À compter du 1er janvier 2022, l’éligibilité aux réductions « premiers engagements » pour les cotisations patronales est conditionnée de manière plus rigoureuse pour les « unités techniques d’exploitation ».

L’unité technique d’exploitation (UTE) est un rassemblement d’entreprises associées. Une nouvelle entreprise membre d’une UTE peut-elle ouvrir une réduction « premiers engagements » ? La réglementation ne permettait pas jusqu’ici de fournir une réponse claire à cette interrogation. Son application demeurait également incohérente, d’où certains abus… Depuis cette année, les choses ont cependant changé : la réglementation détermine le concept d’UTE et prévoit certaines conditions encadrant la façon dont s’ouvre et s’applique une réduction dans une UTE.

Pour rappel : les nouvelles règles destinées aux employeurs belges doivent aussi être appliquées par l’UTE.

Définition d’une unité technique d’exploitation

Une unité technique d’exploitation (UTE) est constituée de différentes entités juridiques en liaison sociale et interdépendance (historique ou simultanée) sociale et économique.

Une « liaison sociale » veut dire qu’il existe au minimum un individu en commun (peu importe son statut) entre ces entités juridiques.

Une exception toutefois à cette règle : reprendre des travailleurs dont l’entreprise a fait faillite ne crée aucune liaison sociale ni aucune UTE. Une nouvelle entité juridique effectuant la reprise d’une entreprise en faillite a le droit d’appliquer une réduction pour les six premiers travailleurs. Cependant, il y a liaison sociale si cette reprise inclut un ou plusieurs individus sans statut de travailleur.

L’interdépendance sociale et économique concerne une coopération qui peut prendre diverses formes : les activités des entités juridiques concernées ont fait l’objet d’une adaptation les unes aux autres, elles proposent des services non dépendants dans un même groupe, etc… L’Office national de sécurité sociale procède à l’évaluation de cette interdépendance en fonction de différents éléments (adresse d’exploitation similaire, clients communs, logo ou site internet collectif…).

La détermination de l’historicité ou de la simultanéité d’une UTE découle de cette interdépendance sociale et économique.

UTE historique ou simultanée ?

Une UTE simultanée est constituée d’entités juridiques actives, en liaison sociale et en interdépendance sociale et économique. Son fonctionnement s’axe sur de multiples entités juridiques. Cela peut être un gérant (ou un associé, un travailleur) et des activités supplémentaires, des clients ou un site internet en commun… L’impact d’une UTE simultanée se poursuit aussi longtemps que les conditions sont respectées.

Une UTE historique comporte plusieurs entités juridiques en liaison sociale et interdépendance sociale et économique préexistante. Il s’agit par exemple d’entités juridiques ayant collaboré pendant plusieurs années, mais qui en raison du départ d’un associé qui a fondé sa propre société, ont retrouvé leur indépendance. L’impact d’une unité technique d’entreprise historique se poursuit durant une année après sa « fondation ».

Tous les recrutements doivent permettre une évaluation sur une période référentielle des douze mois passés. Au bout d’un moment, un recrutement aura lieu avec une période référentielle qui ne comportera plus l’événement qui a créé l’UTE historique.

Effets sur la réduction « Premiers engagements »

Jusqu’au 31 décembre 2021, les réductions des premiers engagements étaient appliquées avec souplesse dans les UTE. Toute nouvelle entreprise (entité juridique) incluse dans une UTE pouvait ouvrir une réduction pour ses six premières embauches. Il fallait cependant que ces embauches représentent des emplois additionnels au sein de l’UTE, peu importe les dimensions de cette dernière.

Par exemple, l’employeur A, qui vient d’être créé, est inclus avec B et C dans une UTE. A engage un premier travailleur le 1er janvier 2021. Durant l’évaluation au niveau de A, un premier rang reste possible. Durant la période référentielle de 2020, B et C ont occupé 5000 travailleurs. A est éligible à la réduction « premier engagement » si, à la date du recrutement (le 1er janvier 2021), lui B et C occupaient conjointement un nombre égal ou supérieur à 5001 travailleurs.

Les règles sont nettement plus rigoureuses en ce qui concerne les recrutements à partir du 01/01/2022 :

  1. Pour une UTE simultanée, le rang est maintenant déterminé au niveau de l’UTE. Un employeur ne peut pas profiter de la réduction si l’UTE totale comporte déjà 6 travailleurs.
  2. Dans le cas d’une UTE historique, chaque entité juridique peut toujours ouvrir une réduction à son niveau, s’il y a une embauche additionnelle au niveau de l’UTE totale. On évalue cet emploi additionnel grâce à des calculs rigoureux. Les transferts d’emplois entre les employeurs d’une UTE commune limitent fortement les droits à ces réductions.

Ce nouveau règlement moins souple est applicable pour chaque recrutement à partir du 1er janvier 2022.

Chaque réduction (1er au 6ème rang) ouverte avant cette année (via un recrutement réalisé jusqu’au 31 décembre 2021) reste ouverte et applicable pour les autres trimestres, bien que le recrutement ne soit plus pris en considération selon le nouveau règlement.

Réduction au sein d’une UTE simultanée

Nouvelles règles à partir de cette année :

  1. Droit ouvert dans l’UTE simultanée : le comptage inhérent à la période référentielle d’une année est réalisé au niveau de l’UTE simultanée. Par conséquent, si une UTE simultanée totale occupe six travailleurs pendant la période référentielle, les nouveaux recrutements par une entité juridique incluse dans cette UTE ne rendent pas éligible au droit à la réduction.
  2. Si l’ouverture d’un rang de la réduction (1er au 6ème) est toujours possible suite à l’évaluation de la période référentielle au niveau de l’UTE, celui-ci sera lié à l’entité juridique qui réalise le recrutement en ce qui concerne la quantité minimale de travailleurs en activité lors de ce recrutement et la quantité minimale de travailleurs en activité durant le trimestre pendant lequel la réduction a lieu. Seul cet employeur peut procéder à l’application du rang (si ce dernier est ouvert). Les multiples employeurs d’une UTE simultanée ne peuvent donc pas l’appliquer en alternance.
  3. D’après le règlement, l’embauche dans l’UTE simultanée doit être un emploi additionnel vis-à-vis de la quantité de travailleurs en service pendant la période référentielle. L’employeur doit maintenir ce recrutement durant au moins un mois. Cette règle demeure théorique puisque l’entité juridique réalisant l’embauche occupe un nombre de travailleurs correspondant au rang ouvert et en service durant la période référentielle plus un (voir 2ème point). Pour rappel : l’emploi additionnel découlant du recrutement doit se maintenir durant au moins un mois dans l’UTE totale.
  4. Dans l’UTE simultanée, l’ouverture et l’application d’un même rang peut être effectuée parallèlement une seule fois. Ce principe est essentiel pour les entités juridiques qui réalisent des recrutements simultanés.

1er exemple

A crée avec B une UTE simultanée et embauche un premier travailleur le 1er mai 2022. La période référentielle pour évaluer l’ouverture d’un rang se situe du 1er mai 2021 au 30 avril 2022.

Admettons que, durant cette période référentielle, quatre travailleurs sont occupés en même temps par B. Théoriquement, A peut ouvrir le cinquième rang, mais il doit occuper au minimum cinq travailleurs à la date d’engagement. Comme ce n’est pas le cas, puisqu’il n’occupe qu’un travailleur, il ne profite d’aucune réduction.

Admettons que durant la période référentielle, six travailleurs étaient occupés en même temps par B. Dans ce cas, A ne peut plus procéder à une ouverture de rang et ne peut donc pas bénéficier d’une réduction.

2ème exemple

A crée avec B une UTE simultanée et embauche ses trois premiers travailleurs le 1er mai 2022. La période référentielle pour l’évaluation de l’ouverture d’un rang se situe du 1er mai 2021 au 30 avril 2022.

Admettons qu’au cours de cette période, deux travailleurs sont occupés de manière simultanée par B. A peut ouvrir un troisième rang car il occupe à cette date trois travailleurs.

A et B doivent maintenir ensemble cet emploi additionnel d’un travailleur (vis-à-vis de la période référentielle) durant un mois minimum. A et B doivent être en mesure de prouver que leur effectif commun compte durant au moins un mois trois travailleurs (peu importe leur identité, les engagements du 1er mai 2022 peuvent faire l’objet d’un remplacement pendant ce mois).

3ème exemple

A crée avec B une UTE simultanée. A et B embauchent respectivement un premier travailleur le 1 er mai 2022. La période référentielle est identique pour les deux employeurs, c’est-à-dire du 1er mai 2021 au 30 avril 2022 (avec aucun travailleur).

Théoriquement, ces embauches permettent l’ouverture d’un premier rang de réduction. Cependant, les règles d’ouverture et d’application unique dans l’UTE simultanée empêchent cette double procédure. Aucun règlement n’encadre une application exclusive. A et B doivent donc s’accorder au sujet de l’entité juridique (A ou B) ouvrant le premier rang. Cet accord est irrévocable : il est impossible d’effectuer un roulement pour appliquer la réduction entre ces deux parties.

Réduction au sein d’une UTE historique

Depuis le 1er janvier 2022, les nouvelles règles sont les suivantes :

  1. Le décompte (quantité maximale de travailleurs en occupation simultanée) de la période référentielle d’un an est réalisé en premier lieu au sein de l’entité juridique.
  2. L’embauche doit correspondre à un emploi additionnel dans l’UTE historique totale et cet emploi doit être préservé durant au moins un mois. La législation belge accorde cinq jours de tolérance : les cinq jours de la période référentielle durant lesquels les travailleurs sont les plus nombreux peuvent faire l’objet d’une neutralisation.
  3. Tout travailleur venant d’être recruté et constituant un emploi issu d’une différente entité juridique dans l’UTE est un remplaçant intégré dans l’effectif de la période référentielle.

Après la détermination définitive du rang, celui-ci sera relié au sein de l’entité juridique pour la quantité minimale de travailleurs en activité pendant l’embauche et celle de travailleurs en activité pendant le trimestre durant lequel la réduction est appliquée.

Pour les employeurs qui recrutent, cela signifie que :

  • Quand les travailleurs pendant la période référentielle d’un an, majoré de la quantité de « remplaçants », sont au nombre de six, il est impossible d’ouvrir des rangs.
  • Si des rangs sont disponibles, ce seront, à cause des remplaçants, les plus désavantagés, avec le chiffre le plus haut.

Exemple d’application

A crée avec B une UTE historique et réalise quatre premiers recrutements le 1er février 2022. La période référentielle pour évaluer l’ouverture d’un rang va du 1er février 2021 au 31 janvier 2022.

La période référentielle de B compte 300 jours avec 45 travailleurs, 60 jours avec 50 travailleurs et 5 jours avec 55 travailleurs. B emploie 48 travailleurs le 1er février 2022.

1. A ne possédait pas de travailleurs en activité durant la période référentielle. Les rangs n°1, n°2, n°3 et n°4 permettent quatre recrutements.
2. La quantité de travailleurs de l’UTE lors de l’embauche doit dépasser celle des travailleurs de l’UTE durant la période référentielle. L’emploi additionnel est quantifié par le solde positif.

Pour compter la période référentielle, on neutralise les cinq jours avec la plus grande quantité de travailleurs, soit 55 – 5 = 50 travailleurs.

Emploi additionnel : 52 (48 + 4) – 50 (période référentielle) = 2

3. A engage quatre travailleurs et l’emploi additionnel s’élève à deux, donc deux « remplaçants » sont embauchés. Seuls le 3ème et le 4ème rang restent accessibles.
4. La possibilité d’ouvrir les rangs définis durant la phase n°3 est conditionnée par la quantité minimale de travailleurs en activité durant le recrutement de ces rangs.
5. Si A procède à l’application des rangs n°3 et n°4, l’emploi au sein de l’UTE totale doit compter au moins 52 travailleurs durant février, sinon le rang qui n’est pas couvert par un mois d’emploi additionnel d’un travailleur (pour l’ensemble des trimestres concernés) est supprimé.